Atelier de Minerve – Georges Prudent

Pour tous les habitués de la fête de la vielle en Haute-Marche et Combrailles, Georges Prudent est un point de repère !
Selon les éditions il nous livre un spectacle en solo, des animations musicales diverses et plus récemment le fruit de son travail en lutherie de vielle à roue et de violon. C’est donc aux côtés d’autres luthiers tels Boudet & fils, P Cranga et P. Mousnier que nous le retrouverons pour l’édition 2006 des 27, 28 & 29 octobre (voir agenda).
Mais avant cette échéance, et peut-être pour mieux apprécier encore son travail, nous lui avons posé quelques questions sur ses itinéraires musicaux et professionnels ou comment un instituteur émérite devient-il luthier ?

Georges Prudent
Georges Prudent

« J’ai commencé l’apprentissage de la trompette à 9 ans, à l’exemple de mon frère. Je l’ai pratiquée pendant une vingtaine d’années, dans divers courants : sociétés musicales, orchestre symphonique alors que j’étais au conservatoire à Moulins, orchestre de bals, petite formation…
A 16-17 ans, j’ai appris seul la guitare d’accompagnement ; plus tard, j’ai fait quelques années de classique. J’ai aussi tardivement touché quelques années au violon lors du lancement de la méthode Suzuki en Creuse.
Quant à la vielle, à une certaine période, si on m’avait dit que j’en jouerai, je crois que j’aurais doucement rigolé…Le premier contact auditif et visuel avec cet instrument, c’est celui de Gaston Rivière lors d’un défilé. Je ne l’ai pas vue de près, et cela avait quand même piqué ma curiosité instrumentale. Je ne connaissais la vielle que par les on-dit, et la musique traditionnelle par quelques chansons fredonnées par des « vieux ».  Aussi, en 1976, quand j’ai eu l’occasion d’approcher René et  Eugène Thomas (cornemuse et vielle) , je n’ai pas manqué de m’intéresser à cet instrument, d’un peu trop près d’ailleurs puisque j’ai –comme beaucoup de curieux- posé le doigt sur la roue. Ayant compris mon intérêt, Eugène m’a invité chez lui. Et c’est cette rencontre qui a tout fait basculer, puisqu’en sortant j’ai dit : « il faut que je trouve une vielle ». Cela a en fait correspondu chez moi à une certaine recherche des racines. Il m’a donc donné mes premières leçons et livré son répertoire. J’ai complété mon apprentissage par quelques stages, puisqu’à mon grand étonnement, ils fleurissaient jusqu’à ma porte.

C’est d’ailleurs lors d’un stage après quelques mois de jeu que j’ai rencontré Jean-Noël Grandchamp, facteur de vielles très renommé. Je l’ai regardé travailler et l’envie de fabriquer est vite venue. Fabriquer un instrument, c’était quelque chose qui me trottait dans la tête depuis longtemps. Je me souviens qu’à l’âge d’une douzaine d’années j’étais fasciné par le violon et que j’en projetais la construction. Ce n’est qu’à 18 ans que j’ai pu travailler sur un instrument, une guitare défoncée que j’ai retapée. Pour la vielle donc, j’ai acheté un plan de vielle plate à Jean-Noël et je me suis lancé avec un outillage restreint. Auparavant, comme j’étais enseignant, j’avais présenté l’instrument dans ma classe et galéré pour faire fabriquer à des enfants de 8 à 11 ans une vielle réduite, d’après mes propres plans. Ce fut une expérience pédagogique extraordinaire. Ainsi, nous avons pu l’inclure dans notre « orchestre » : vielle, accordéon et flûtes à bec.
Les années passant, s’imposait de plus en plus à moi l’idée informelle d’une installation en tant que luthier. Il y a dix ans, j’ai eu l’opportunité de travailler une année scolaire à Tours chez un très bon luthier de violon qui a bien voulu me transmettre la tradition de la lutherie parisienne. J’ai quand même attendu l’âge de la retraite et je me suis installé. Mais ne voulant pas reprendre une fonction à temps complet, j’ai le statut d’artiste libre qui me laisse une bonne latitude. Aussi, je ne fais pas trop de publicité pour garder une partie de temps à faire d’autres choses. Malgré tout, mon activité (fabrication- réparation de vielles, réparation de violons et autres instruments à cordes) m’occupe bien, au gré des commandes ou réparations. Dans cette activité, j’ai toujours eu une part importante consacrée à la recherche et à la réflexion sur les instruments. Ainsi, lorsque s’est posée la question des modèles à proposer, il m’a paru évident de délaisser la copie (sauf bien entendu dans le cas d’une réplique d’instrument ancien), qui pourtant m’aurait bien facilité les choses. Je présente donc des modèles « originaux ». Bien entendu, il ne s’agit pas pour moi de prétendre posséder des instruments personnellement inventés ou réinventés ! Dans tous les domaines, on a besoin de la somme des réflexions menées par les générations précédentes en lutherie comme ailleurs. Je me suis donc inspiré de maîtres anciens ou modernes pour créer mes propres formes, personnaliser tel ou tel détail. De plus, j’essaie de suivre au mieux la demande des clients, j’apprécie beaucoup ce côté échanges qui m’oblige à renouveler mes propositions. Mes clients sont très divers dans les âges- jeunes ou plus anciens- dans leur pratique musicale et dans la répartition géographique : ils sont locaux sans doute, mais aussi de Nantes ou de Chambéry, du Cantal ou de l’Ardèche…
J’ai de bons rapports avec les collègues que je rencontre notamment dans les expos ; comme nous sommes tous des passionnés, il est toujours intéressant d’échanger, et c’est là que l’on voit l’énorme place prise par la musique et les instruments dans notre vie. »

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