La valse de Château

Cette valse est chantée par Jean Chabosy, enregistré  par José Dubreuil le 02/03/1989 à La Renaudie, près de Larodde, canton de Tauves dans Puy-de-Dôme.

Jean Chabosy a appris cette valse auprès d’un certain  »Château », violoneux du pays de Tauves. Ce morceau était son préféré. Ce chanteur a la particularité de reprendre à la voix des morceaux reconnus comme instrumentaux. A la première écoute on est frappé par la variété et le choix des onomatopées qu’il utilise ( »natou nanatou » et  »tilali lalilo »). Il existe une corrélation entre ces sons de voix et ceux d’un violon, comme si les syllabes étaient destinées à traduire les nuances d’un archet.

D’ailleurs ce morceau, connu également sous le titre de  »valse de la chasse », est un classique du répertoire de l’Artense, en voici une version interprétée par Joseph Perrier.

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Les onomatopées semblent servir à rendre une ambiance. Ces deux versions montrent un contraste entre une première partie plutôt planante et une seconde plus rythmique. Au violon, cela est rendu par les coups d’archet et les coups de doigts (ornements), mais à la voix, ça se passe comment? Jetons un coup d’oeil à la partition pour y voir plus clair.

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On se rend compte que ce ne sont pas les syllabes en elles même qui créent l’ambiance (planante ou rythmique) mais plutôt la façon de les articuler. Dans la première partie Jean Chabosy allonge les notes les plus longues presque jusqu’à la rupture et relance systématiquement avec le même motif rythmique (deux doubles croches, croches). Dans la seconde, le motif de relance n’est pas présent, par contre, il pique les notes en accentuant les consonnes, profitant d’une découpe rythmique plus fine.  Cette constance de traitement lui permet de varier les onomatopées et d’éviter l’effet de répétition.

Non! vous avez bien vu! nous avons bien noté une valse en 6/8, et non en 3/4! En voici l’explication: le chanteur s’accompagne avec les pieds de façon à soutenir la cadence. Ce sont eux qui assurent le rythme à trois temps en marquant fortement le premier temps, en éludant le second, et en marquant doucement le troisième. A la voix c’est différent. Les premiers temps de chaque mesure ( soit un temps fort de la valse sur deux) sont accentués. Tout se passe comme si, dans la tête du chanteur, se déroulait le moteur rythmique suivant: 1, 2, 3; 2, 2, 3;  1, 2, 3; 2, 2, 3…, au lieu de 1, 2, 3, 1, 2, 3.

Ce système a pour effet d’introduire un balancement particulièrement efficace pour la danse.  Ce temps fort sur deux devient semble t-il le véritable repère rythmique du chanteur. L’unité de mesure que nous avons choisi est donc une noire pointée. Cette notation non conventionnelle nous permet de mettre en avant la dynamique du morceau.

D’ailleurs, si vous tendez l’oreille, vous vous apercevrez que les pieds ne sont pas métronomiques, mais qu’ils suivent la dynamique. Si les premiers temps marqués aux pieds sont réguliers, les troisièmes temps bougent un peu en suivant le mouvement, mais on n’a pas du tout l’impression que la battue du rythme est irrégulière.

Il y a du vivant là-dedans, l’alternance des temps forts faisant penser à une respiration. Et, si, pour essayer, on laisser tomber les métronomes?

Mira Cassan

Eric Desgrugillers

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