En Passant l’Hiver

INTERVIEW – QUESTIONNAIRE

En Passant l'Hiver

Eric Desfour (chant, violon, percussions, textures sonores) et Dominique Bonin (chant, accordéon diatonique, vielle à roue) proposent depuis quelques années un concert en duo intitulé « En Passant l’Hiver », présentant une interprétation originale du répertoire d’Auvergne et du Limousin. Orienté vers les chants et musiques calendaires (liés à des fêtes rituelles comme Carnaval, Noël, les Réveillez…), leur tour de chant a fait l’objet d’un CD 5 titres qu’ils ont auto-produit. Enquête sur les deux compagnons de musique.

 

1.  Afin de situer dans le contexte historique… Pour chacun d’entre vous, qu’avez-vous fait auparavant, ou en parallèle de cette aventure ? Quel parcours a pu vous amener à créer « En Passant l’Hiver » ?

Dominique : Je connais bien ce répertoire pour l’avoir mis en place une première fois avec les musiciens Nicolas Rouzier et Philippe Ancelin, il y a une dizaine d’années. Nous avons joué environs quinze concerts et puis pour des raisons d’emplois du temps de chacun, nous nous sommes arrêtés. J’ai toujours exprimé le besoin de jouer ces «Aires del pais» d’Auvergne et Limousin pour moi et mes élèves.

Éric : Pour ma part, j’ai pratiqué le répertoire des Réveillez à l’occasion de stages avec François Breugnot, une sortie nocturne dans le pays de Condat avec Jean-Claude Rocher. Je connais bien les chants liturgiques des églises chrétiennes pour avoir porté le violon et la robe d’enfant de choeur lors de la messe.

2.  Quand et comment est né ce duo?  Quelles étaient les envies de départ ?

Dominique : C’est tout naturellement que j’ai proposé à Éric en 2010 de rejoindre un concert des Réveillez avec mes élèves de l’antenne de Bort-lès-Orgues. C’était un partenariat entre l’École de Musique de Haute-Corrèze (EMHC) pour mes cours, l’association des Violonaires Artensiers ; et le CdMDT15 par rapport aux cours de violon d‘Éric à Champs-sur-Tarentaine. Nous avons joué les deux années consécutives en 2010 et 2011 en l’église de Marchal et de Champs.

Éric : Ensuite, nous avons décidé de constituer un répertoire de musiques calendaires, sorte d’almanach sonore que nous pourrions adapter à la période de concert, au fil des saisons. Pour le moment, c’est un duo, mais nous envisageons aussi des invitations artistiques pour nos concerts : musiciens, conteurs, danseurs …

3.  La plupart des musiciens qui s’emparent des musiques traditionnelles exploitent le répertoire à danser. Pourquoi avoir choisi principalement d’explorer le répertoire des musiques calendaires? En quoi cette musique vous touche ?

Éric : Les musiques à danser ne sont pas exclues de notre tour de chant, bien au contraire. Je prends pour exemple le «petit bal de NoËl» qui est un moment de danse en concert. Sauf qu’un temps après, nous nous retrouvons dans une évocation plus narrative avec des climats musicaux. En fait, nous voulons parler au corps et à l’âme.

Dominique : Personnellement, je cultive la terre, élève des abeilles, en humble amateur j’entends. Je suis sensible à la couleur du pays. Cette musique me touche particulièrement car elle parle bien de la Nature, des saisons qui passent, à l’image de la vielle à roue.

4.  Ces chansons étaient a priori destinées à un usage social, de rencontre et de mémoire autour de grands événements rituels. Quel intérêt voyez-vous, aujourd’hui en 2014, d’en faire un répertoire de concert ?

Éric : L’usage social dont vous parlez, essentiellement d’expression rurale est aujourd’hui révolu mais il s’est aussi déplacé et complexifié, à l’humeur de nos sociétés industrialisées. Je pense malheureusement que notre condition citadine nous éloigne inexorablement de Dame Nature, voire de notre propre nature humaine. C’est du pur exotisme que de faire aujourd’hui une marche dans les prés à vaches ! Les croyances rurales ancestrales de nos campagnes, tour à tour paiennes et chrétiennes, nous mettent au pied du mur de nos frêles certitudes du vingt-et-unième siècle. Elles nous rappellent des valeurs d’existence essentielles qui sont : le respect d’autrui et de la différence, l’humilité et la bienveillance, le sens de l’entraide communautaire etc…

Dominique : Plus proche de nous, c’est aussi l’occasion de faire découvrir à des élèves musiciens, mélomanes… des sonorités incroyables de gaieté et de fraîcheur. Rire et s’émerveiller de la vie, voilà la grande idée des poètes-musiciens de nos contrées.

5.  Dans cet album, vous utilisez la MAO pour créer des accompagnements sonores. Comment est né ce choix ? Comment travaillez-vous cette matière et son intégration dans le répertoire traditionnel ?

Éric : Comme ce sont des outils que j’utilise depuis maintenant pas mal d’années, j’avais envie d’en faire découvrir à Dominique les atours débordants de créativité. Je suis un fervent défenseur du courant musical Électro-ambient, animé par des figures de proue comme Aphex Twin, Boards Of Canada, le label Warp (GB) ; j’ai suivi les ateliers de musique électroacoustique auprès de Christian Sébille, actuellement directeur du GMEM. Après, je dirai que c’est un laboratoire qui se réalise dans mon Home Studio, avec beaucoup d’échanges entre Dominique et moi sur des matières à jouer ou pas. Notre découverte des pierres chantantes a été décisive pour élaborer un concept sonore. Nous avons collecté cette fois des «amphibolites» à Entremont, près de Dienne à côté de chez moi, et non plus le papi violoneux du coin. Juste changement d’époque et de pratique !

Dominique : Eric vient de parler d’une autre approche, qu’on croirait ne pas appartenir aux musiques traditionnelles. Pourtant, il y a un point commun avec le répertoire : c’est la musique de paysage. J’ai par le passé travaillé avec Alain Savouret, compositeur de musique contemporaine, et bien qu’un «routinier» jouait aux côtés d’ une pianiste classique, à aucun moment je n’ai eu l’impression de découdre du socle originel qu’était ce répertoire de musique traditionnel.

Éric : Oui, et je rajouterai juste que cette musique traditionnelle est vivante, en perpétuelle réinvention d’elle-même. Il ne tient qu’à la sensibilité du musicien de s’en emparer. Pour ma part, le répertoire me rapproche de mes bases, du jeu essentiel : créer l’ambiance et être dans l’instant, dans un soucis d’efficacité.

7.  Cette musique a jusque là traversé les âges. Pensez-vous qu’il lui reste encore longtemps à vivre ? 

Éric : Elle est à l’image de la Terre, elle survivra par nous ou sans nous. Elle exprime l’universalité des sentiments humains, leur lien aux éléments et à la Nature. Une bouteille est jetée à la mer, peut-être qu’un homme du futur s’en emparera pour en faire une symphonie new age … Qui sait ?

8.  Comment est né ce disque ? Où et comment l’avez-vous enregistré ? 

Éric : J’ai soumis à Dominique au printemps dernier la proposition de réaliser cet enregistrement avec comme objectif d’en faire notre carte de visite. Cela a aussi permis d’asseoir des arrangements et des choix musicaux. Tout a été conçu, des enregistrements  jusqu’au mixage final par mes soins avec mon matériel de studio portatif. Ce CD 5 titres annonce un véritable album qui sortira l’an prochain.

9.  Où peut-on se procurer le CD ?

En passant l’Hiver Dominique Bonin & Éric Desfour Concert à domicile

 Association Almacén Tuilière 15300 Dienne France

T: 04 71 20 82 23     E: almacen@orange.fr

L: www.de4studio.bandcamp.com

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