Hommage à Pierre LADONNE

Le 29 juillet 1931 naquit un enfant que ses parents prénommèrent Pierre. Pierre comme son père et son grand-père. Troisième du nom, Pierre Ladonne comme les deux autres avant lui, fût joueur de cabrette.
Après la présentation de son récit de vie, je vais tenter de vous parler de l’homme en essayant de ne pas omettre l’une de ces qualités, que ce soient celles de conteur, d’enseignant, de passeur de mémoire, d’écrivain, sans oublier sa fidélité en amitié et son attachement à la cabrette.
Traiter de ces talents de musicien est difficile. Pour cela tous ceux qui l’ont entendu pourront développer cet aspect en fonction de leur sensibilité et pour les autres, ces divers enregistrements vous permettront de mesurer le son qui était le sien et la maîtrise technique qui le caractérisait.
Quelle chance que la modernité nous est permis de mettre en boîte la musique de ceux qui ne sont plus parmi nous.
Sur les trois générations de Pierre Ladonne, deux ont fixé leur musique sur disque : son père et lui.
En toute confidence nous nourrissons l’espoir d’entendre son fils Pascal à la suite de ceux qui l’ont précédé.
Quant au grand-père nous n’avons pas le moindre enregistrement et seule la mémoire phénoménale de Pierre avait gardé suffisamment de souvenirs pour que nous ayons une idée précise de son jeu et de son répertoire.
En fait, ce que je souhaite aborder en ce jour c’est avant tout l’homme mémoire que fut Pierre Ladonne disparu de nos vies ce 26 janvier 2020.
Il est dans l’humanité des hommes qui naissent et vivent avec une capacité exceptionnelle à se souvenir afin que des pans entiers de la culture d’un pays soient préservés et transmises au plus grands nombres.
A toutes nos rencontres, Pierre nous montrait à quel point il se souvenait de tout ce qu’il avait vu et entendu.
Des milliers d’anecdotes étaient classées dans sa mémoire et il nous suffisait de poser une question pour qu’il puisse durant des heures dévider le disque dur de ses souvenirs.
Sans lui une grande partie de la musique des Auvergnats de Paris et du Massif Central auraient disparu dans le précipice de l’oubli.
Il était là tel un phare éclairant nos besoins de tout savoir. Avec lui nous avions trouvé une mine intarissable.
Fort de cette fabuleuse mémoire il put ainsi écrire une méthode de cabrette en réalisant une synthèse entre les savoirs de son père et les siens.
Au-delà de cette publication, il rédigea, chose exceptionnelle, un ouvrage intitulé « Del cap de la Roca Négra » roman autobiographique qui relate la vie de sa famille et place la musique et la cabrette au cœur de ce livre remarquable, car il n’y a que de très rares personnes de sa génération qui, en France, ont écrit leurs souvenirs sur ce thème.
Son caractère ouvert et tolérant lui donna cette prédisposition pour l’écoute, l’échange et le besoin de transmettre son savoir. Il avait un véritable goût pour faire passer ses souvenirs d’une mémoire à une autre et par bonheur  nous avions des magnétophones rendant sa parole immortelle et désormais accessible à tous.

En créant dans son village un stage autour de son instrument, il mit Thérondel au cœur du paysage et de l’histoire de la cabrette.

Il était là, dans sa maison ouverte sur ce pays au croisement du Cantal et de l’Aveyron.
Il était là à la charnière de cette incroyable musique.
Il était là toujours disponible avec un sens de l’accueil renforcé par Nicole qui accompagnait sa passion au plus près de ces désirs.
Sa discrétion et son humilité renforcèrent l’homme qu’il était, le musicien qu’il fut et la référence qu’il ne cessera d’être.

Mon cher Pierre au nom de tous ceux qui t’ont connu et apprécié et avant tout au nom des musiciens que tu as croisés et aimés et tout particulièrement les joueurs de cabrette que tu as rencontrés, conseillés, orientés, formés, soutenus et encouragés nous te saluons.
Pierre, dors tranquille, le son des regrets et des bourrées ne cesseront de venir jusqu’à toi.
Pierre, sois persuadé que tous les moments partagés, ta parole et ta musique jamais ne nous quitteront car tu vibreras en elles atteignant ainsi une pérennité que tu as su créer par ta générosité et ton talent.
Afin que ces mots te facilitent le chemin qui te conduit vers tes ancêtres, à l’égal de ton père demandant que tu lui joues cette mélodie en forme de prière, nous te l’offrons à notre tour pour que nous soyons tous reliés à ta personne et à ton histoire.

Con pachoro dobon mo pouorto…

André RICROS

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