Adìu Pèire !

Si rien n’est immuable, certaines choses ont du mal à s’effacer, même avec le temps, et laissent des traces qui seront visibles longtemps, pour plusieurs générations après nous.

Il en est certainement ainsi de l’œuvre de Pèire Boissière. L’homme s’en est allé samedi, habillant nos esprits de deuil ; mais sa voix, sa voix si particulière est là, pour celles et ceux qui l’ont entendue, à l’intérieur de nous, continuant pour le reste de nos jours à tracer des sillons.
Et je dis nos esprits parce que Pèire était de ces personnes qui touchent l’esprit d’abord, avec une précision et une hauteur qu’il avait soin de maintenir, même dans les choses pratiques ou quotidiennes.

Fondateur de l’Institut d’Etudes Occitanes du cantal, amoureux et fervent défenseur de la langue occitane, chanteur, transmetteur, collecteur hors pair, conteur, poète… autant d’activités se rejoignant en cohérence dans ce patrimoine culturel occitan qu’il a passé sa vie à valoriser. Nous avons eu la chance à l’AMTA de collaborer avec lui pour nos collections historiques d’archives : « musique du canton » et « atlas sonores » et de rester, même de loin, en contact régulier.

***

C’est aussi à titre personnel que je souhaiterais parler de lui, moi qui n’ai pas l’habitude de faire des hommages, je ne peux ici m’empêcher de le faire. Car au-delà des quelques moments et projets partagés ensemble, Pèire a été une des personnes les plus importantes de mon existence, avant même que je ne le connaisse. Je n’ai jamais osé le lui dire quand j’ai eu l’occasion de le faire.

La rencontre de sa voix si singulière à l’écoute du disque « Cap negre » fut un choc, comme on en vit peu dans une vie, et d’une langue si belle qu’on a envie de la parler, sur une musique modale qui vous traverse comme un rayon de lumière dans les arbres. Si j’ai voulu chanter en occitan, c’est bien parce que j’ai écouté Pèire Boissière, et je pense que je ne suis pas le seul dans ce cas. Pour moi, il a été le début de tout, l’influence vocale la plus durable et la plus prégnante, qui continue à me travailler de l’intérieur, à m’élever s’il est possible.

Et j’ai toujours, même des années après, le même plaisir à l’écouter :

 

« Jol pont de Mirabèl » est extrait de son disque solo « Margarida » où il s’accompagne d’un tambourin à cordes. Il a toujours pris soin d’avoir à son répertoire des versions de chansons trouvées en Auvergne, comme celle-ci.  

*

Non, si rien n’est immuable, j’ai bien peur, et c’est une chose heureuse, que sa mémoire le soit !

Adiu Pèire
e merces per tot ço qu’as fach !
Eric Desgrugillers

5 Comments

  1. Alice

    Merci Pèire pour tout ce que tu laisses… J’ignorais totalement qui tu étais lorsque j’ai débarqué dans un stage de chant d’un week-end, il y a longtemps, à Auvillar. J’ai absorbé ce que j’ai pu de l’abondance que tu nous as offerte pendant deux jours. Aujourd’hui, je chante une berceuse que tu nous avais apprise à ma nièce née cet automne…

  2. Pingback: L’hebdo de la FAMDT #48 – Agence des Musiques des Territoires d'Auvergne

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